Comment raconter les blagues

Savoir raconter des blagues est un excellent moyen de relancer une discussion ou de détendre l’atmosphère. Et pour cause, les vertus de l’humour ne sont plus à démontrer. Celui qui sait maîtrise l’art délicat de l’histoire drôle s’assure de briller dans les réunions mondaines, et sera vu comme un bon vivant à la compagnie recherchée.

Et pourtant, savoir raconter n’est pas inné. Au contraire, il s’agit d’une compétence qui fait appel à de nombreux talents comme la mémoire, le jeu d’acteur, le sens du timing, etc. Et comme toutes les compétences, celle-ci doit être travaillée pour se développer.

Voici quelques éléments à prendre en considération pour devenir un bon conteur :

L’originalité

Le nombre de blagues existantes est pratiquement infini, et pourtant, avez-vous remarqué que ce sont toujours les mêmes que l’on entend ? Et généralement pas les meilleures, soit dit en passant… Une blague entendue plusieurs fois ne fait plus rire, et si vous vous contentez de répéter encore et toujours les mêmes histoire de toto usées jusqu’à la chute, vous avez toutes les chances de vous manger un “je la connaissais”.

Faites l’effort de vous documenter. Il existe de très nombreux bouquins qui recensent des tonnes de bonnes histoires dont certaines sont fort peu connues. Vous pouvez également faire des recherches sur Internet pour trouver des sites humoristiques, qui regorgent d’histoires (plus ou moins) drôles.

Les histoires drôles peuvent jouer sur plusieurs types d’humour pour faire rire. Citons l’humour gras, l’humour noir (je l’adore, celui-là), l’humour absurde (je l’aime bien aussi), etc. Essayez d’être éclectiques, plus vos blagues sont variées, plus facilement vous pourrez les placer.

La mémoire

C’est bien beau de raconter des blagues, mais encore faut-il être capable de s’en rappeler. Il vous faudra un minimum de mémoire pour enregistrer toutes ces histoires drôles. Vous voulez connaître un moyen de faire un énorme bide ? En voici un infaillible : commencez à raconter votre blague, et prenez bien soin d’avoir un trou de mémoire au moment de la chute. Imparable !

Pour éviter ces mésaventures, évitez d’avoir du Gruyère à la place du cerveau. Si vous n’arrivez pas à mémoriser des milliers de blagues, focalisez vous sur une petite dizaine. En matière d’humour, il faut privilégier la qualité à la quantité.

Si vous racontez une de vos blagues favorites, vous n’avez pas trop de crainte à avoir. En revanche, lorsque vous tombez pour la première fois sur une histoire qui vous semble digne d’être ressortie, entraînez vous au moins une fois ou deux devant un miroir. Vous vous épargnerez l’embarras de vous rendre compte au moment de la chute que vous avez oublié le petit détail sans lequel votre blague n’a aucun sens.

Le sens du timing

Vous êtes devenu un dictionnaire d’histoires drôles ambulant, votre mémoire est infaillible ? Parfait ! Il manque quelque chose, mais quoi ? L’occasion, pardi ! Vos blagues, il va bien falloir trouver un moment pour les raconter, non ?

C’est là que le sens du timing entre en jeu, et qu’il va falloir respecter ce bon vieil adage plein de sagesse : avant l’heure, ce n’est pas l’heure, après l’heure, ce n’est plus l’heure. Il va falloir faire preuve d’attention. Imaginez que vous êtes un fauve tapi dans les fourrés, guettant le bon moment pour bondir sur sa proie. Voilà l’état d’esprit qui doit être le votre si vous espérer placer votre vanne dans la conversation.

Votre blague aura beaucoup plus de légitimité, et beaucoup plus d’impact si son sujet est en rapport avec la conversation. Je distingue deux cas différents : dans le premier, vous suivez normalement la conversation, et êtes d’humeur taquine. A un moment précis, par une association d’idées, une blague en rapport avec le sujet vous vient à l’esprit. N’hésitez pas ! Dés que c’est votre tour de parler, lancez vous. Attention, n’interrompez pas celui qui détient la parole, d’abord parce que c’est très impoli, ensuite parce que cela augmente à votre tour vos chances de vous voir ravir votre temps d’expression.

Dans le deuxième cas, vous avez une histoire précise en tête, que vous voulez absolument replacer. C’est dans cette situation que vous devrez être le plus attentif. Vous allez devoir manœuvrer avec finesse et saisir le moindre prétexte pour balancer votre blague. Si besoin est, vous pouvez même tenter de dévier la conversation vers le sujet qui vous intéresse. Petite précaution : ne vous lancez pas dans votre histoire tout de suite après avoir vous même changé de sujet. Je vous assure que ça va se voir.

Dans tous les cas, si vous manquez le coche et laissez passer l’occasion, soyez beau joueur, et attendez une meilleure occasion. Ce serai dommage de gâcher une bonne histoire parce qu’elle tombe comme une cheveu dans la soupe.

Avoir du tact

Avez vous remarqué que la plupart des blagues se moquent du malheur des membres de groupes ethniques ou de minorités ? Que ce soient les blondes, les belges, les militaires, les noirs, les juifs, les chasseurs, les américains, les hommes, les femmes, les musulmans, les homosexuels, les fonctionnaires, les flics, les jeunes, les vieux, les animaux, les hommes politiques, les pompiers, les belles-mères, et j’en passe… Tous, ils en prennent pour leur grade (il y en a qui le méritent, mais je ne dirai pas lesquels 😉 ).

Avant de vous lancer dans une grande diatribe sur la prétendue légèreté des blondes, prenez la précaution de vérifier qu’une de ces charmantes demoiselles à la chevelure dorée ne se trouve pas a portée d’oreille. Pour peu qu’elle soit susceptible, vous pourriez regretter votre étourderie.

Il ne s’agit pas d’hypocrisie, mais de tact. Le but d’une blague est de faire rire, non ? Faites preuve d’empathie, surtout si vous vous adressez à des personnes que vous connaissez peu. Même si une saillie humoristique peut vous sembler anodine et sans conséquences, il n’est pas impossible que vous blessiez quelqu’un. Tout le monde n’a pas le même sens de l’humour que vous.

Les talents de conteur

Grâce aux quelques conseils précédents, vous avez réussi à placer la bonne blague au bon moment. Et maintenant ? Et bien, il reste le plus difficile : raconter la blague. Des talents de conteur seront indispensable si vous espérez déclencher la moindre hilarité chez vos interlocuteurs.

Pour comprendre à quel point la manière de raconter est importante, amusez vous à réaliser l’expérience suivante. Commencez par trouver un bon recueil d’histoires drôles, parcourez-le, et sélectionnez la meilleur blague que vous puissiez trouver. Ensuite, choisissez un interlocuteur habituellement jovial et enjoué, et contez lui votre histoire d’un ton monocorde en lisant votre livre mot-à-mot. Si vous parvenez à lui arracher autre chose qu’un sourire poli, vous aurez bien de la chance.

En matière de communication interpersonnelle, saviez vous que le langage corporel véhicule une très grande majorité de votre message, contrairement aux mots qui n’en font passer qu’une très petite partie ? Si vous voulez que vos histoires aient un effet, il va falloir donner de votre personne.

En fait, quand vous racontez une blague, vous êtes un peu dans le cas d’un orateur qui s’adresse à une assemblée, et les mêmes règles s’appliquent. Je ne vais pas détailler les différents moyens de parler en public, puisque cela nécessiterait un article complet (que j’écrirai sans doute un de ces jours). Toutefois, voici quelques règles de bases :

  • Parlez fort : Vous voulez que tout le monde vous entende, non ? Alors parlez suffisamment fort pour atteindre vos auditeurs les plus éloignés, mais ne cassez pas non plus les oreilles de votre public en hurlant.
  • Respirez, sinon, vous allez exploser. Bien des orateurs débutant s’imaginent que pour parler en public, il faut nécessairement parler vite. Je me rappelle des premières fois où je me suis adressé à une assemblée. Une vraie mitraillette. Erreur, grossière erreur ! N’allez pas plus vite que la musique, ménagez des pauses, modulez votre débit. Un orateur qui prend son temps est beaucoup plus agréable pour les auditeurs. Attention tout de même à ne pas laisser s’endormir vos interlocuteurs.
  • Le contact oculaire est très important. C’est ce qui vous permettra de maintenir votre public en éveil. Regardez tour à tour les membres de l’assemblée, et soutenez leurs regards quelques secondes chacun. Si quelqu’un regarde ailleurs, fixez le jusqu’à capter son regard.
  • Structurez votre discours. Personne ne comprendra une histoire sans queue ni tête (à moins qu’il ne s’agisse d’humour absurde). Votre histoire doit avoir un début, un milieu et une fin.

Il y a en plus quelques éléments un peu plus spécifiques aux histoires drôles que vous devez maîtriser :

  • Le jeu d’acteur : Impliquez tout votre corps dans le récit, laissez libre court à votre expression corporelle. Si votre histoire comporte des personnages, imitez leurs attitudes, leurs comportements, leurs mimiques, bref ! donnez leur vie.
  • L’accent : Une blague belge sans accent belge ? Impensable ! Imiter l’accent de vos personnages est essentiel pour accentuer l’effet comique. Si votre histoire met en jeu des belges, ou des québécois, vous pouvez vous en donner à cœur joie.
  • Le suspense : Très fréquemment, l’humour d’une blague réside dans sa chute. Entretenez le suspense, créez l’attente chez vos auditeurs, maintenez-les en haleine. Plus ils voudront connaître la fin, plus l’impact sera important.

Le mot de la fin

Voici donc quelques conseils qui feront de vous, même si la liste est loin d’être exhaustive, un redoutable conteur de blagues.

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